L'imbroglio de la suppression de la taxe d'habitation Abonnés
Cette réforme non pensée et inapplicable révèle une erreur politique, doublée d’une erreur de gestion. Rompre le lien fiscal entre les habitants et la collectivité de proximité qu'est la commune sera lourd de conséquences, sauf à s'inscrire dans une volonté délibérée de revenir sur la décentralisation et d'éloigner le pouvoir de décision des citoyens. Au-delà de cet aspect politique, cette erreur se traduira par une perte d'autonomie des communes, quel que soit le nouveau mode de financement imaginé. Le seul argument consisterait à réduire les dépenses publiques. Mais le gouvernement ne semble pas armé pour atteindre rapidement et significativement cet objectif. L'idée saugrenue dont le ministre de l’Economie est à l'origine conduit le gouvernement à tenter de faire des "économies de bouts de chandelles" dans des domaines qui laisseraient à penser que le Président serait celui des riches. A cela s’ajoutent des erreurs de communication : déclarer que le "Plan pauvreté" est reporté en raison du déplacement du Président à la coupe du monde de football plutôt que d'annoncer que le dialogue continue avec les associations et professionnels du métier relève de l'impossible.
Lors de la réunion de l’instance de dialogue le 4 juillet, le gouvernement a annoncé qu’au premier semestre 2019, un projet de loi de finances rectificative engagera la réforme de la fiscalité locale (le même scénario depuis plus de 40 ans). Selon un communiqué de Matignon, les communes seront compensées de la suppression de la taxe d’habitation par la redescente de la taxe foncière sur les propriétés bâties aujourd’hui affectée aux départements. Cette orientation figure dans le rapport de la mission Richard-Bur. Ainsi une mauvaise idée génère des réformes et des mesures de correction hasardeuses, qui ne font l’affaire de personne. De surcroît, la mise en œuvre de cette proposition serait "d’une extrême complexité". Elle implique la mise en place d’un mécanisme de garantie des ressources assurant qu’aucune collectivité ne verra ses recettes baisser à l’issue de la réforme. Un dispositif similaire au fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR) mis au point pour assurer la compensation de la suppression de la taxe professionnelle en 2010, mais dont "tout le monde est mécontent". Le fonds étant "bloqué à sa date de mise en œuvre", il se révèle être "une peau de chagrin". Avec la mise en place d’un tel fonds de garantie à l’occasion de la suppression de la taxe d’habitation, "l'engagement de rembourser à l'euro près ne serait pas tenu", selon le président du Sénat, André Laignel.
Jacques KIMPE le 05 juillet 2018 - n°407 de La Lettre des Finances Locales
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