Responsabilité délictuelle à des ententes illicites : le pouvoir des juges Abonnés
Un cas d’école
Plusieurs entreprises attributaires de marchés publics à l’occasion d’un vaste programme de rénovation de lycées en Ile-de-France avaient été condamnées par l'Autorité de la concurrence pour entente illicite (code du commerce, art. L 420-1). Des responsables, des fonctionnaires et des mandataires de la région avaient également été pénalement condamnés pour favoritisme et participation frauduleuse personnelle à cette entente (art. L 420-6).
La région, maître d’ouvrage, avait alors poursuivi en réparation l’ensemble des protagonistes, personnes physiques et morales.
Le litige avait pour objet la responsabilité de sociétés et de leurs préposés en raison d’agissements susceptibles d’avoir conduit la région Ile-de-France à passer des marchés publics à des conditions de prix désavantageuses. Un tel litige relevait de la compétence de la juridiction administrative. Il visait à réparer le préjudice qui aurait résulté de la différence entre les termes des marchés publics effectivement conclus et ceux auxquels ils auraient dû l’être dans des conditions normales de concurrence.
En théorie, les litiges nés à l’occasion de la procédure de passation d’un marché public relèvent du juge administratif (T. conflit 23-5-2005 n° 3450 ; CE 19-12-2007 n° 268918 et CE 19-3-2008 n° 269134 ; Cass. 1e civ. 18-6-2014 n° 13-19.408).
Toutefois, comme l’avait jugé la cour d’appel dans cette affaire (CA Paris 24-6-2015 n° 14/01570 : BRDA 14/15 n° 18), l’action introduite par la région Ile-de-France n’avait pas pour objet d’obtenir réparation de préjudices causés par les conditions de passation d’un ou plusieurs marchés déterminés. Elle portait sur les conséquences dommageables de l’ensemble des pratiques anticoncurrentielles commises à son détriment par des personnes privées, physiques ou morales. Or, le contentieux de telles pratiques appartient normalement au juge judiciaire.
Le Tribunal des conflits introduit la notion inédite d’ « altération d’un contrat ».
En outre, pour désigner les responsables, fonctionnaires et mandataires de la région, le Tribunal a utilisé l’expression de « préposés » des entreprises attributaires de marchés (T. conflit. 16-11-2015 n° 4035).
Ndlr : pourtant, il ne semble pas que la situation des intéressés réponde à la définition donnée par l’article 1384, al. 5 du code civil relatif à la responsabilité délictuelle du fait des préposés, mais ainsi fut jugé le comportement des élus et fonctionnaires territoriaux.
Jacques KIMPE le 23 novembre 2017 - n°392 de La Lettre des Finances Locales
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