Partenariat public privé : bilan très mitigé des chambres régionales des Comptes Abonnés
Les collectivités s'affranchissent de leurs obligations juridiques
Les contrats de partenariat sont tenus à un formalisme juridique strict (art. L. 1414-1 et suivants, CGCT), qui n’est pas toujours respecté. La Cour note notamment des évaluations préalables souvent orientées et des critères pas toujours justifiés : le respect des trois critères d’éligibilité (complexité, urgence et efficience économique), même s’ils sont alternatifs et pas cumulatifs, n’est pas toujours assuré. La Cour constate la prédominance du critère de la complexité et dénonce son manque de justification dans certains cas. Le critère d’efficacité économique, plus récent, est très difficile à établir. Autre constat : les dispositifs contractuels sont peu protecteurs des intérêts de la personne publique. La Cour dénonce l’absence des 12 clauses obligatoires prévues dans le CGCT (art L. 1414-12) dans certains documents contractuels. Elle souligne les imprécisions ou incohérences dans les contrats qui peuvent conduire à mal répartir le risque et les charges entre personnes publique et privée. Tel est le cas des clauses d’indexation du coût de l’investissement ou de révision du loyer.
Des pénalités insuffisantes imposées aux partenaires de la collectivité
Par ailleurs, la personne privée, qui se doit de réaliser des objectifs de performance, n’est pas souvent sanctionnée par un système de pénalités efficient. Le risque pris par le titulaire apparaît faible en regard des pénalités et des incitations au respect des objectifs. Une des conséquences de ces imprécisions est la passation d’avenants : 97 % des contrats sont renégociés.
Les justifications des collectivités du recours au PPP
- le montant de l’investissement est significatif ;
- la soutenabilité budgétaire est démontrée ;
- un motif avéré de complexité, d’urgence ou d’efficacité économique ;
- une évaluation préalable non biaisée est réalisée ;
- le partage des risques est réellement équilibré entre la collectivité et le titulaire du contrat ;
- une réelle mise en concurrence dans l’attribution du contrat ;
- la collectivité est apte à négocier et à assurer le suivi du contrat sur sa durée.
Un suivi des contrats insuffisant
Les collectivités ne maîtrisent pas toujours l’exécution des contrats en ne se dotant pas des moyens techniques et humains nécessaires, faute de dispositif de contrôle interne et un suivi relevant d'experts. Les lacunes du suivi d’exécution peuvent se traduire par l’absence de production par le cocontractant du rapport annuel obligatoire, ou de sa présentation devant l’assemblée délibérante (art. L. 1414-14 et R. 1414-8 du CGCT). La Cour préconise d’intégrer, dans le document d’orientation budgétaire, le compte rendu annuel d’exécution du contrat, décrivant notamment son coût réel.
Des difficultés pour établir le bilan financier
Les collectivités ont des difficultés à établir un bilan de l’efficience et des coûts de ces contrats, pour plusieurs raisons : la complexité des modèles financiers utilisés ; l’absence d’outils fiables de comparaison entre les différents modes de gestion déléguée ; la difficulté de comparer le bilan d’un projet réalisé en contrat de partenariat avec celui d’une procédure classique que la personne publique n’a pas lancée ; des évaluations préalables pas toujours réalistes.
Il en résulte que de nombreux contrats présentent un bilan financier défavorable par rapport aux prévisions et s’avèrent a posteriori plus coûteux que les marchés classiques. « Les loyers versés sont souvent élevés et les coûts prévisionnels largement dépassés, du fait de clauses contractuelles défavorables aux collectivités, mais aussi d’avenants conclus dans un sens généralement favorable aux entreprises ».
Pour remédier à cela, la Cour préconise d’étendre aux collectivités territoriales l’obligation d’une étude de soutenabilité budgétaire au stade de l’évaluation préalable.
Plus de 41 % des contrats relèvent de l’équipement urbain et en grande partie de contrats d’éclairage public (60 sur 149). La durée des contrats signés varie de 10 ans pour le système d’information multimodale en région Alsace, à 32 ans pour la réalisation et l’exploitation du Théâtre de l’Archipel à Perpignan.
Jacques KIMPE le 16 avril 2015 - n°335 de La Lettre des Finances Locales
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